9179-0717 Québec inc. c. Ville de Saint-Colomban, 2022 QCCS 358
La Cour supérieure vient de rejeter un recours en dommages de 350 000$ contre la Ville de St-Colomban. Les demanderesses avaient encouru des frais pour l’aménagement d’un futur développement résidentiel, lequel a finalement avorté puisqu’il contrevenait à la réglementation municipale. Les demanderesses ont plaidé, sans succès, que la Ville était responsable du coût des travaux inachevés, notamment la construction d’une rue.
Les faits
En 2008, les demanderesses font l’acquisition d’un terrain sur le territoire de la Ville. Aucune demande de permis n’est déposée. L’année suivante, en 2009, la Ville adopte des règlements de zonage et de lotissement qui interdisent l’ouverture de nouvelles rues en bordure de terrains de moins de 40 000 m2. Ces règlements font en sorte que le projet domiciliaire envisagé ne peut avoir lieu.
Rien ne bouge du côté des demanderesses jusqu’en 2011, alors qu’elles commencent les travaux de construction de la rue sans aviser la Ville au préalable ni obtenir les permis et les ententes requises. Alors que les travaux sont en cours, les demanderesses déposent en mai 2012 un plan de développement préliminaire auprès de la Ville. Le Conseil municipal approuve par erreur celui-ci en juin 2012.
Les permis nécessaires pour le développement domiciliaire ne seront finalement jamais émis par la Ville compte tenu de la réglementation adoptée en 2009. Les demanderesses déposent un recours pour forcer l’émission du permis (sur la base des résolutions du Conseil municipal de juin 2012), lequel est rejeté par la Cour supérieure en 2017. Le juge mentionne ce qui suit au passage :
Il se peut que le comportement de la Ville ou de ses représentants, élus ou non, ait pu induire les demanderesses en erreur quant à la règlementation applicable ou quant au statut du projet et ainsi les inciter à effectuer des dépenses qu’elles n’auraient pas autrement engagées. Cependant, le recours ici entrepris contre la défenderesse ne vise pas à obtenir des dommages, mais plutôt à l’obliger à donner suite aux résolutions (de juin 2012) de manière à permettre la réalisation du projet de développement (des demanderesses).
Fort de ce commentaire de la Cour supérieure, les demanderesses déposent un nouveau recours contre la Ville, cette fois en dommages pour obtenir le remboursement du coût des travaux inachevés.
Le jugement
Les demanderesses mordent de nouveau la poussière de le cadre de leur recours en dommages. La Cour supérieure insiste d’abord sur le fait que les demanderesses ont commencé leurs travaux en 2011, avant l’erreur de la Ville d’approuver le plan de développement préliminaire survenue en 2012. Cette erreur d’approuver les plans qui ne sont pas conformes à la réglementation municipale ne portait donc pas à conséquence.
Les demanderesses plaident néanmoins que la Ville est fautive de ne pas les avoir informé de l’adoption des règlements en 2009, lesquels avaient pour effet d’empêcher le développement envisagé. La Cour supérieure détermine cependant qu’une telle obligation n’existait pas :
[61] (La demanderesse) plaide que la Ville a commis une faute en ne l’avisant pas que la règlementation municipale en vigueur depuis 2009 interdisait la construction du chemin proposé par la demanderesse. Or, la jurisprudence est bien établie que les officiers municipaux n’ont pas l’obligation d’informer des citoyens du contenu des règlements. Il appartient au promoteur « de vérifier la légalité de tous les aspects de son projet et de requérir, au besoin, l’opinion d’un juriste sur la règlementation pertinente ». Selon la preuve, monsieur Desjardins n’a jamais obtenu d’avis professionnel concernant la légalité du son projet.
(…)
[68] Le Tribunal reconnait que ses conclusions sont sévères à l’égard de monsieur Desjardins et ses sociétés. Cependant, les demanderesses auraient dû s’informer de leurs droits et obligations avant d’agir. Elles auraient dû respecter les exigences imposées par les règlements municipaux, sans présumer la complaisance de la Ville. Bref, elles auraient dû veiller au grain.
Ainsi, l’adoption d’une nouvelle réglementation n’emporte pas l’obligation par la municipalité d’en informer les personnes qui pourraient voir leurs éventuels projets compromis, par exemple un propriétaire ou un promoteur dont le projet de développement est maintenant impossible. Cela demeure vrai lorsque la municipalité, par ses élus ou ses employés, d’une façon ou d’un autre, a été informée de ce projet.
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