Restaurants Canada c. Ville de Montréal, 2019 QCCS 4549
En 2016, l’arrondissement de Côte-des-Neiges-Notre-Dame-de-Grâce de la Ville de Montréal a adopté des règlements de zonage visant à limiter l’implantation de nouveaux restaurants rapides, notamment à proximité des écoles.
Cette nouvelle réglementation aura notamment pour effet d’empêcher l’expansion de certaines chaînes de restaurations rapides ou le déménagement de celles-ci (vu la perte des droits acquis).
Selon la nouvelle réglementation, les restaurants rapides visés sont définis par trois (3) caractéristiques particulières, à savoir (i) la prédominance de contenants, emballages ou assiettes jetables dans lesquels les repas sont servis, (ii) la consommation sur place et (iii) l’absence de service aux tables.
L’association demanderesse, appuyée par certaines chaînes comme McDonald, A&W et Rôtisseries St-Hubert, contestait cette nouvelle réglementation. Elle alléguait essentiellement ce qui suit :
[2] Ils invoquent que les dispositions concernées dans le règlement introduisant ces modifications sont illégales en ce qu’elles visent à réglementer les habitudes de consommation des citoyens, plus particulièrement des enfants fréquentant des écoles dans l’arrondissement, ce qu’une municipalité ne peut pas faire par le biais de la Loi sur l’aménagement et le territoire et, donc, par un règlement de zonage.
La demanderesse invoquait notamment la décision de la Cour supérieure de l’Ontario Eng v. Toronto (City), dans laquelle la Ville de Toronto avait réglementé la possession, la vente et la consommation d’ailerons de requins sur son territoire; la Cour avait déterminé que cela était ultra vires des pouvoir municipaux.
Est-ce que l’arrondissement avait le pouvoir de contrôler et de réglementer l’expansion de la restauration rapide sur son territoire ?
La Cour supérieure distingue la décision susmentionnée et applique plutôt le réputé arrêt Spraytech de la Cour suprême. Comme l’arrondissement vise à limiter l’expansion de la restauration rapide dans certaines zones et non de généralement combattre ce type d’alimentation, l’arrondissement agit à l’intérieur de ses pouvoirs.

Par ailleurs, la Cour supérieure rejette l’argument de la demanderesse à l’effet que de limiter l’expansion de la restauration rapide dans certaines zones ne constituerait pas une raison de santé publique en vertu de l’article 113(2)16.1 ° LAU. Dans tous les cas, elle ajoute que le fait de ne pas constituer une raison de santé publique ne fera pas pour autant en sorte de nier les pouvoirs généraux de la municipalité :
[33] Les procureurs de la demanderesse et des intervenantes invoquent le sous-alinéa 113 (2) 16.1° LAU, a contrario, qui se lit comme suit :
16.1 régir ou prohiber tous les usages du sol, constructions ou ouvrages, ou certains d’entre eux, compte tenu de la proximité d’un lieu où la présence ou l’exercice, actuel ou projeté, d’un immeuble ou d’une activité fait en sorte que l’occupation du sol est soumise à des contraintes majeures pour des raisons de sécurité publique, de santé publique ou de bien-être général;
[34] Cette disposition vise donc à permettre de régir ou de prohiber tous ou certains usages du sol, de constructions ou d’ouvrages lorsque l’occupation du sol est soumise à des contraintes majeures pour des raisons – entre autres – de santé publique – à cause de la proximité d’un immeuble ou l’exercice d’une activité.
[35] Pour les avocats de la demanderesse et des intervenantes, ce sont ces dispositions qui seraient autrement applicables, mais parce que la notion de santé publique ne pourrait s’appliquer à l’alimentation, l’arrondissement aurait outrepassé son pouvoir; cependant, pour le tribunal, même en admettant qu’ils aient raison en ce qui concerne la notion de santé publique, ce qui n’est pas néanmoins démontré, la disposition n’aurait pas pour effet de restreindre la portée des pouvoirs généraux des municipalités.
La Cour supérieure en vient donc à la conclusion que les nouveaux règlements tels que modifiés sont intra vires des pouvoirs de l’arrondissement. D’autres règlements seront-ils adoptés dans les autres municipalités québécoises?
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