9201-6468 Québec inc. (Recycle Auto 2000 IM) c. Municipalité des Îles-de-la-Madeleine, 2019 QCCA 345
Nous avons discuté il y a peu de temps de ce propriétaire qui n’a pas obtenu la clémence de la Cour supérieure alors qu’il avait enfreint la réglementation municipale : il doit maintenant détruire son chalet nouvellement construit.
La Cour d’appel et la Cour supérieure viennent de rendre deux (2) nouveaux jugements dans lesquels le Tribunal refuse d’exercer sa discrétion (en application de l’arrêt Ville de Montréal c. Chapdelaine) afin de permettre la continuation de l’infraction aux règlements municipaux.
Une cour à ferrailles aux Îles-de-la-Madeleine
Dans une récent jugement de la Cour d’appel, l’appelante exploite une cour à ferrailles en contravention du règlement de zonage de la municipalité. Ayant vu son argument concernant l’existence d’un droit acquis rejeté, elle se rabat sur la discrétion de la Cour supérieure afin d’obtenir la permission de continuer ses activités. La Cour d’appel résume l’état du droit :
[25] La jurisprudence a de tout temps reconnu « que les tribunaux gardent une certaine marge de pouvoir discrétionnaire, de façon à pallier les iniquités et injustices qu’une application stricte et rigoureuse de la loi et des règlements pourrait entraîner dans certaines espèces ». Le pouvoir discrétionnaire du juge prévu à l’article 227 L.A.U. représente un pouvoir limité qui ne s’exercera qu’en présence d’une situation dite exceptionnelle.
Non seulement la Cour d’appel ne voit aucun motif pour justifier le fait qu’il s’agirait d’une situation exceptionnelle, mais elle mentionne en plus que la contravention de l’appelante à la Loi sur la qualité de l’environnement (LQE) fait en sorte que sa demande est dans tous les cas vouée à l’échec. Elle s’exprime ainsi relativement au respect de l’article 22 LQE :
[38] Cette affaire nous donne l’occasion de rappeler les enseignements tirés de la jurisprudence selon lesquels cette disposition ne se contente pas d’interdire les activités dommageables d’un point de vue environnemental, elle vise aussi à les prévenir : (…)
[39] La Cour a souvent réitéré les conséquences associées au fait d’entreprendre des travaux sans le certificat d’autorisation requis par cette disposition. À l’une de ces occasions, la Cour s’exprimait sur la question en ces termes : (…)
[40] Le dossier d’appel fait voir que l’appelante n’a jamais obtenu le certificat d’autorisation du ministre et que cette exigence constituait une condition incontournable pour la poursuite de ses activités. Cette seule raison est suffisante pour rejeter l’appel.
Un autre chalet qui doit être détruit
Dans la récente affaire Municipalité de Pontiac c. Marenger, 2019 QCCS 859, la Cour supérieure ordonne ici aussi la destruction (ou le déplacement) d’un chalet. Celui-ci avait été bâti en zone inondable, en contravention de la réglementation.
Malgré plusieurs avertissements de la municipalité à l’effet que le défendeur ne pouvait construire un nouveau chalet sur le lot (mais uniquement rénover le chalet existant), celui-ci a tenu tête à la municipalité.
Dans un jugement détaillée, la Cour supérieure refuse d’exercer sa discrétion et ordonne le déplacement ou la destruction du nouveau chalet, et ce au nom de l’intérêt public et de l’équité envers les autres citoyens qui se sont conformés à la réglementation :
[134] En l’espèce, la Municipalité a agi avec diligence. En fait, la Municipalité a dû intervenir à plusieurs reprises pour faire respecter sa réglementation et les conditions d’émission du permis. L’inspecteur, le directeur du service d’urbanisme, Salah et même le maire sont intervenus pour faire respecter la réglementation et éviter au défendeur d’être en illégalité. Contrairement aux allégations du défendeur de l’application presque abusive de sa réglementation, le Tribunal considère que la Municipalité n’a fait que son travail; appliquer sa réglementation à un citoyen récalcitrant de la respecter.
[135] Le Tribunal peut difficilement cautionner un citoyen qui va à l’encontre des consignes, règlements, avis d’infraction et avis de suspension des travaux. Le défendeur a commis des actes dérogatoires à répétition. Il s’est heurté à une municipalité qui ne se laisse pas imposer les intérêts personnels du défendeur au détriment de l’intérêt collectif.
[136] Les effets du maintien de la situation dérogatoire seraient injustes à l’égard de tous les propriétaires riverains de la Municipalité qui se sont conformés à la réglementation.
[137] Dans cet exercice, le Tribunal doit certes examiner l’absence de bonne foi du défendeur, et avant tout, la situation dérogatoire majeure où il est interdit toute nouvelle construction en zone inondable. La réglementation tient compte de l’intérêt public.
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1 réflexion au sujet de “Discrétion de la Cour en présence d’un recours sous l’article 227 LAU : deux jugements récents”